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"Roucadour l'art initial gravé"
Première publication de la majorité des gravures et peintures préhistoriques ( - 28.000 ans env.) de la grotte de ROUCADOUR - Lot - , découvertes (en 1962) par Jean-Paul Coussy. Texte sur la main de Sapiens sapiens de Pierre Daix historien d’art, extraits d’études d’André Glory préhistorien (à l’époque chargé de l’étude de Lascaux, décédé depuis). Cet exceptionnel patrimoine d’art pariétal préhistorique classe dorénavant le Quercy parmi les régions les plus anciennes de l’histoire de l’humanité.

Pour commander cet ouvrage en ligne et accéder au site sur la grotte de Roucadour, cliquez sur l'image ci-dessous :

La représentation humaine dans les grottes Chauvet et la Grande grotte d'Arcy-sur-Cure
Entretien avec Dominique BAFFIER dans "art absolument"


Notre choix de présenter ici l'entretien de Dominique Baffier avec François Jeune, permet d'apprécier le point de vue sur l'art pariétal et les artistes contemporains d'une spécialiste de l'Art préhistorique, Conservateur de la grotte Chauvet...

Dominique Baffier, conservateur en chef du patrimoine, grotte Chauvet, MCC-Drac RA

(art absolument) : Vous qui avez été élève d'André Leroi-Gourhan à Arcy-sur-Cure et sur le site de Pincevent, pouvez-vous, après l'interprétation tout au long du XXe siècle de l'art préhistorique en tant qu'art pour l'art d'abord, puis magie de la chasse pour l'abbé Breuil, de la grotte-cathédrale de l'abbé Jean Bouyssonie, de la méthodologie structurale d'Annette Laming-Emperaire, du symbolisme sexuel d'André Leroi-Gourhan, du chamanisme proposé par Jean Clottes et David Lewis-Williams ou des figures et des signes rupestres comme proto-écriture selon Emmanuel Anati, faire état des théories actuelles et de la possible coexistence des théories interprétatives accumulées ? Quelles seraient, selon vous, les approches interprétatives les plus récentes de l'art paléolithique ?

Dominique Baffier : Les différentes théories concernant la signification de l'art paléolithique depuis sa découverte : l'art pour l'art, magie de la chasse, totémisme, structuralisme, chamanisme, etc., sont le plus souvent le reflet de leur temps et révélatrices, historiquement, des courants d'idées et de leur évolution.

Quand les recherches ethnographiques se développent avec Frazer, Durkheim et Lévy-Bruhl, les préhistoriens projettent sur l'art pariétal les pratiques magiques et d'envoûtements mises en évidence chez des peuples divers. Les travaux d'anthropologie structurale de Claude Levi-Strauss sur les structures de parenté dans les sociétés primitives influenceront A. Laming-Emperaire dans sa nouvelle lecture des compositions pariétales qu'elle interprète alors comme la représentation d'alliances et d'échanges matrimoniaux entre clans exogamiques. Le courant environnementaliste d'outre-Atlantique propose une lecture sociale et utilitaire de l'art qui aurait pour but de favoriser la transmission de l'information et l'intercommunication entre les groupes. Les travaux de Lewis-William sur l'art des San d'Afrique du Sud ont relancé, avec J. Clottes, l'hypothèse du chamanisme qu'avait autrefois proposée l'abbé Glory, à l'époque où les premiers ouvrages en russe sur les peuples sibériens sont traduits et deviennent accessibles.

Toutes ces théories, qui se succèdent, ont le mérite de vouloir comprendre la mentalité des hommes préhistoriques, de décrypter leur message, pénétrer dans leur vie spirituelle. Aucune d'entre elles, isolée, n'apparaît pourtant satisfaisante pour rendre compte de la richesse de la pensée préhistorique. Aucune de ces hypothèses ne semble pouvoir non plus être rejetée en bloc. Certes, il ne faut pas abuser, comme au début du siècle, des rapprochements ethnographiques, mais comment ne pas penser que la chasse devait tenir une place non négligeable dans les préoccupations de populations dont la subsistance en dépendait, sans pour cela devenir le pivot de toute leur symbolique ? Comment abandonner le structuralisme ? Il est certain que la caverne est "participante" comme l'écrivait A. Leroi-Gourhan, que les figures ne sont pas disposées au hasard et que le support joue un rôle déterminant. Il apparaît aussi, toujours comme le pensait Leroi-Gourhan, que la dichotomie de la pensée humaine semble universelle - le Yin/le Yang, la vie/la mort, le mâle/la femelle, la nuit/le jour, le noir/le blanc, etc. -, dualité d'opposition ou de complémentarité qui a pu exister dans la pensée préhistorique.

Ces théories diverses paraissent toutes présenter une part de vérité qui pourrait s'appliquer à certaines figurations, certains assemblages paléolithiques, certains "morceaux" du message. Mais elles ne peuvent restituer isolément la signification de cet art. L'explication univoque est incomplète et réductrice, les faits sont trop complexes et multiples et beaucoup trop de données ont irrémédiablement disparu pour qu'une hypothèse puisse être démontrée ou niée infailliblement.

AA : Comme en leur temps Nicolas de Staël avait été frappé par Altamira ou Gérard Gasiorowki par ce qu'il appelait « la pluie de peinture » de Lascaux, à Chauvet où les représentations sont particulières - techniques mixtes entre peinture et gravure, effaçages, effets cinétiques ou de perspective par la répétition des silhouettes animales -, comment réagissent les artistes d'aujourd'hui que vous avez invités à visiter la grotte ? Sont-ils associés aux recherches des scientifiques comme l'est par exemple Jean-Louis Schefer ?

DB : Quelques artistes, peintres, plasticiens, sculpteurs, essentiellement étrangers, mais aussi ethnologues et historiens de l'art, font effectivement partie de l'équipe scientifique de la grotte Chauvet. Ils ne participent pas directement à l'étude proprement dite, mais ayant pu visiter la grotte, ils échangent leurs impressions avec les chercheurs et des discussions fructueuses ont lieu lors de ces rencontres.

D'autres artistes-peintres mais également des poètes ou des écrivains ont sollicité une autorisation de visite exceptionnelle de la cavité. Leur réaction est toujours la même. Ils sont éblouis et extrêmement émus. L'émotion est le sentiment qui domine et qui envahit tous les visiteurs, qu'ils soient ou non artistes. Cette constante est due à la grotte elle-même mais également aux vestiges conservés sur les sols et aux fantastiques peintures, vieilles de trente millénaires, qui ornent les parois. La grotte Chauvet, de près de 500 mètres de développement, est une merveille naturelle.

Ses salles sont vastes, de plusieurs dizaines de mètres de large et de long, aux voûtes élevées. Le concrétionnement : colonnes et disques immaculés, draperies festonnées ocrées, fragiles fistuleuses ou buissons d'excentriques désordonnées, font de cette grotte un phénomène géologique d'une pureté et d'un éclat prodigieux qui saisit le visiteur et l'impressionne. Ses sols conservent les restes nombreux d'ours des cavernes qui venaient y hiberner et les témoins variés laissés par les hommes lors de leurs activités dans la caverne. Les mots manquent pour qualifier l'art pariétal de la grotte. Les peintres contemporains semblent sortir "choqués" de leur visite et n'expriment leur stupéfaction que par quelques mots : "fantastic", "incroyable", "I'm still alive"....


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