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"Roucadour l'art initial gravé"
Première publication de la majorité des gravures et peintures préhistoriques ( - 28.000 ans env.) de la grotte de ROUCADOUR - Lot - , découvertes (en 1962) par Jean-Paul Coussy. Texte sur la main de Sapiens sapiens de Pierre Daix historien d’art, extraits d’études d’André Glory préhistorien (à l’époque chargé de l’étude de Lascaux, décédé depuis). Cet exceptionnel patrimoine d’art pariétal préhistorique classe dorénavant le Quercy parmi les régions les plus anciennes de l’histoire de l’humanité.

Pour commander cet ouvrage en ligne et accéder au site sur la grotte de Roucadour, cliquez sur l'image ci-dessous :

Expédition Ultima Patagonia 2006
Luc-Henri FAGE

Riche bilan archéologique

Comme au cours de l´expédition 2000, la vraie surprise inattendue de nos explorations vient des découvertes archéologiques en grottes. La Cueva Ayayema, avec son crâne daté de 4500 ans BP, avait déjà attiré les intérêts des spécialistes de ce peuple de nomades marins, les Indiens Alakaluf ou Kaweskar. Cette fois, il est clair que ces groupes ont occupé largement les parties les plus avancées sur le front Pacifique, et qu´ils ont utilisé les abris naturels, aussi bien pour s´abriter, probablement le temps d´une chasse aux otaries, que pour y peindre sur les parois, et enfin pour enterrer leurs morts. La mémoire ancienne d´un peuple quasiment disparu, est en train de sortir de l´oubli à Madre de Dios...


Les peintures de la Grotte du Pacifique

Après la prospection et les découvertes de l´an 2000, les grottes côtières de l´archipel de Madre de Dios n´avaient pas tout dit... Au cours d´une tentative de sortie sur le Pacifique, quatre d´entre nous ont découvert une grotte située 4 m au-dessus du Pacifique. Le sol couvert de gros amas coquiller et les parois les plus reculés de peintures à l´ocre orange et de dessins au charbon de bois ont été instantanément identifiés et les mesures de protection minimales appliquées.
Au cours d´un séjour de trois jours, malgré des conditions météo exécrables, ce sont 45 objets peints qui ont été décomptés, dont 26 peintures à l´ocre. Les peintures à l´ocre sont situées plutôt en hauteur (de 50 cm à 4 m), et les charbons de bois majoritairement au bas des parois (maxi. 70 cm).
Les motifs anthropomorphes sont les plus nombreux (11), suivis par les signes géométriques comme des « rouelles solaires ». On pourrait lire certains motifs selon la grille ethnographique fournie par José Emperaire. Ainsi, trois lignes rouges croisées pourraient correspondre aux bâtons enduits d´ocre posés en pyramide au-dessus d´un mort. Un anthropomorphe cornu pourrait correspondre à la divinité Alakaluf Kawtcho.
Les nomades de la mer passaient chaque année quelques mois sur la côte Pacifique pour chasser les jeunes otaries, d´octobre à janvier. On imagine aisément que les longues journées de tempêtes interdisaient la navigation dans leurs fragiles canots d´écorce ou de planches, et que la grotte a servi de refuge pour attendre l´éclaircie favorable. Les mammifères marins semblent reproduits à deux occasions dans la grotte. L´une, par la transformation d´une saillie rocheuse naturelle en animal marin par la simple adjonction de traits rouges pour marquer la bouche... L´autre, au bas de la paroi, où deux tracés linéaires symétriquement opposés suggèrent des têtes d´otarie se frôlant le museau, un comportement naturel aux loups de mer.
L´importance de la découverte est énorme. C´est la première grotte ornée pour toute la partie maritime de l´archipel de Patagonie, qui soit attribuable directement à la culture des nomades de la mer.

En effet, le sol est jonché d´amas coquilliers, avec des fragments d´ossements, typique de la culture des chasseurs marins Alakaluf. L´épaisseur de l´amas peut être devinée sur quelques-uns des 11 trous qui le perce, (peut-être des niches d´oiseaux marins, ou bien le fait des humains, pour assécher la surface de l´abri, inondé par temps de pluie par des ruissellements ?) Cette épaisseur montre que la grotte a été occupée durant une longue période, voire plus probablement à intervalles annuels. L´amas coquiller présente un monticule charbonneux qui devait être le foyer central.
À noter que la partie la plus ouverte de la grotte présente des vestiges contemporains. La présence d´une date (1961), ainsi que des débris (planche, bonnet, verres, foyer moderne), témoignent que jusqu´à une période récente des chasseurs d´animaux marins ont utilisé l´abri ; mais on note nettement un hiatus dans les vestiges. Il s´agit probablement d´une réutilisation tardive, par des Alakaluf contemporains (années 30-60), voire des marins Chilotes.
Cette réutilisation se manifeste aussi dans une série de 4 figurines à l´ocre fin. La technique utilisée semble être un tracé par frottis et non une peinture. Ces formes peuvent être vues comme des lettres de l´alphabet latin... ou comme des anthropomorphes. La différence de technique plaide pour un ajout tardif.


Les sépultures du seno Barros Luco

Une prospection audacieuse dans le seno Barros Luco, a permis le 1er février de découvrir trois abris-sous-roche aménagés (replats) contenant des restes de nourritures (coquillages, os d´animaux et d´oiseaux marins) et des sépultures humaines. Les trois ont en commun d´être situées en hauteur à peu de distance de la mer et présentent des aménagements rocheux pour dégager des surfaces aplanies. La juxtaposition d´un abri de vie et de sépulture est surprenante quand on sait les interdits qui frappent les lieux où sont morts et où sont abandonnées les dépouilles des Alakaluf. Peut-être s´agit-il d´un usage à des périodes de temps très différentes. Ou alors d´abris abandonnés une fois qu´ils sont devenus des sépultures.
Grotte n° 1 : Véritable petite grotte au pied d´une falaise qui plonge dans la mer au contact calcaire/grès, de forme triangulaire, de 6 à 8 m de côtés, et de 1 à 4 m de hauteur. Au pied de l´éboulis d´entrée, on trouve deux surfaces aménagées rectangulaires (de 2 par 1,20 m environ), bordées de cailloux, contenant des coquillages et des restes humains (mâchoire, os longs). Sous un gros bloc posé contre la paroi se trouvent deux crânes humains, partiellement calcités.
Au niveau de la mer, entre trois gros blocs formant un petit abri naturel de 2 m de profondeur sur 1 m de large, on a trouvé des restes d´os longs humains, os de pieds ou mains, des vertèbres et des côtes. C´est donc, en surface tout au moins, les restes de trois individus, dont 2 crânes qui se situent ici.
Grotte n° 2 : Grand abri-sous-roche, dans un pied de falaise, peu commode et humide, présentant des surfaces aménagées en espalier avec des restes alimentaires. Dans un renfoncement de la paroi, un individu a été enterré, on voit en surface son crâne (moussu) et des os longs (tibia, péroné, hanche, vertèbres...)
Grotte n° 3 : Abri naturel creusé en triangle dans une roche non calcaire (schistes, ardoise ?), aux dépens d´une faille qui plonge jusqu´à la mer, et a formé une espèce de rampe naturelle pour accéder à l´abri. Le sol de cet abri est en pente de 30 à 35°, dans le pendage de la faille. En bas, trois replats confortables ont été aménagés (blocs, et dalles d´ardoise). Des animaux ont soulevé quelques blocs du premier replat et fait apparaître deux côtes humaines. Il semblerait qu´une sépulture soit en place sous ce dallage...

Conclusion

Une fois de plus, les spéléologues, explorateurs tenaces du monde souterrain, sont ici comme ailleurs dans la planète, à l´origine des découvertes archéologiques en grotte.
Le bilan archéologique à mi-parcours de l´expédition, complétant celui de l´expédition 2000 mené par Dominique Legoupil, illustre bien l´exceptionnel intérêt archéologique de ces îles calcaires, dont la moindre cavité un tant soit peu propice semble avoir été utilisée par les nomades de la mer. Ce bilan permet de donner au programme de protection de l´archipel Madre de Dios une touche culturelle (World Cultural Heritage) complétant l´aspect naturaliste du site.
Les quatre cavités archéologiques ont fait l´objet d´études préliminaires sommaires de notre part (plan, relevés schématiques, photos, observations...) En l´absence d´archéologue patenté nous nous sommes limités strictement à ce qui était visible en surface et nous n´avons touché à rien.
La grotte du Pacifique, une fois fouillée et datée, devrait permettre de préciser le mode de vie ancien des Alakaluf, et les trois grottes sépulcrales fournir au moins 5 individus dans des sites funéraires intacts. Un travail passionnant commence pour les archéologues spécialistes des nomades de la mer...

LH Fage, 7 février 2006

texte et photos © Luc-Henri Fage

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