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"Roucadour l'art initial gravé"
Première publication de la majorité des gravures et peintures préhistoriques ( - 28.000 ans env.) de la grotte de ROUCADOUR - Lot - , découvertes (en 1962) par Jean-Paul Coussy. Texte sur la main de Sapiens sapiens de Pierre Daix historien d’art, extraits d’études d’André Glory préhistorien (à l’époque chargé de l’étude de Lascaux, décédé depuis). Cet exceptionnel patrimoine d’art pariétal préhistorique classe dorénavant le Quercy parmi les régions les plus anciennes de l’histoire de l’humanité.

Pour commander cet ouvrage en ligne et accéder au site sur la grotte de Roucadour, cliquez sur l'image ci-dessous :

Rencontres 2005 : rétrospective
Maria ROUBAUD

Pergouset - © G.Astruc
APPRENDRE A S´ECOUTER

Au premier matin Jean-Paul Coussy a défini l´idée maîtresse de ce travail collectif qui associe les préhistoriens et les artistes contemporains présents ici :apprendre à s´écouter. Pierre Cadars notre « modérateur » a tout fait pour prouver qu´il ne s´agissait pas d´un voeu pieux et que le dialogue pouvait se nouer par delà le temps, l´espace et les oppositions de goût. La petite salle de Labastide-Murat restera donc, pour nous, à jamais, liée au souvenir de ces journées magiques où elle s´est agrandie aux dimensions du monde d´il y a quelque 20 000 à 30 000 ans, un monde où de Bornéo à la Patagonie, en passant par l´Afrique et l´Australie, et bien sûr par les Causses du Quercy qui nous entourent, des hommes et des femmes de la préhistoire ont marqué leur passage sur terre.

Henri Cueco, Emmanuel Anati, Robert groborne ©ARPEC2005 / P-O Templier
SE SITUER DANS UN MONDE ENIGMATIQUE

Nous n´avons pas résolu au terme de c es trois journées les interrogations dont Serge Juskiewensky , président du Parc naturel des Causses du Quercy s´est fait l´écho dans son discours de bienvenue :interrogations a-t-il rappelé qui ont été et sont celles des hommes de l´art :Malraux, Breton, Valéry, René Char subjugué devant Lascaux et qui en appelle à la sagesse aux yeux plein de larmes. Interrogations qui sont les nôtres « nous qui ne concevons pas l´art de la préhistoire comme des vestiges, mais dans leur plénitude humaine » et enfin bien sûr les interrogations des créateurs des cavernes ornées « cherchant à se situer dans un monde énigmatique ». Faut-il rappeler, toujours à l´instar de Serge Juskiewensky qu´il s´agissait d´hommes anatomiquement modernes, qui ont construit un langage diversifié, qui l´ont enrichi et dans lequel nous reconnaissons l´oeuvre d´art »La difficulté où noujs sommes à entrevoir cette aurore de l´humanité n´enlève rien à notre émerveillement. » Cet émerveillement est partagé par l´histoire d´art moderne Pierre Daix qui fut directeur des « Lettres françaises ». Il ne dit pas autre chose lorsqu´il fait l´aller retour entre l´art d´Altamira et celui de Picasso, l´un et l´autre hispaniques.

QUAND L´ART DEPASSE L´ARTISTE

La découverte du néolithique prouvait que les arts primitifs avaient déjà une longue histoire derrière eux, et justifiait la formule de Picasso « Il n´ y a pas de progrès en art »Puisque l´on ne voit que ce que l´on sait voir, rappelle Pierre Daix, les artistes modernes nous ont appris à mieux comprendre le dialogue des artistes de la préhistoire avec la matière ; Justement c´est de cela dont il a été question durant ces journées si bien remplies : bien voir, ainsi que nous y a invité l´autre soir à Espedaillac devant les relevés de la découverte des gravures et peintures de Roucadour, Emmanuel Anati, brillant paléo-ethnologue, directeur du centre camunien à Capo di Ponte en Italie. Rappelant au passage la conformité des identités artistiques entre nos ancêtres d´il y a cent cinquante générations et nous, et combien il arrive aujourd´hui comme hier que l´art dépasse l´artiste. Cette conformité de sensibilité ne va pas toujours de soi. Là où Albert Bitran et Michel Cure sont charmés des trouvailles de l´art pariétal, Loutre B. n´y voit qu´ébauches tout juste dignes d´étudiants débutants aux Beaux Arts. Robert Groborne lui s´intéresse davantage aux relevés, à la facture des dessins et des gravures plus qu´à leur configuration définitive.
CONVERGENCE AVEC LE Xxe SIECLE

Il est vrai que le mot définitif est à proscrire autant que le mot inachevé puisque l´art pariétal pour Pierre Daix notamment est contrairement à l´art académique un art de l´ouverture. C´est dans ce sens que Norbert Aujoulat, responsable du département d´art pariétal au Centre national de préhistoire de Périgueux dans son analyse de la grotte de Lascaux démontre à propos des chevaux chinois qu´il suffisait à l´artiste de la préhistoire de tracer la crinière et deux points qui figurent la courbe d´une encolure pour évoquer la silhouette entière du cheval. On voit , images à l´appui, que bon nombre de figures de l´art pariétal fonctionnent à partir de signes, d´idéogrammes qui marquent une convergence avec l´art abstrait du 20ème siècle. Ce qu´Albert Bitran confirme à travers une citation de Matisse : « Ce que vous appelez inachevé, c´est la brèche par laquelle je fais entrer le spectateur » ; Pierre Daix renchérit en citant Picasso parlant de Miro et du point placé là où il fallait sur la toile.

Jean Clottes © ARPEC / P-O Templier
UNE AVENTURE GRANDIOSE

Parce que comme le suggère Jean Clottes «Quand on les cherche on les trouve» les traces de l´art rupestre continuent d´arriver à nous à une cadence soutenue sous les formes les plus diverses :gravures, tracés digitaux, piquetages au nord du Cercle polaire, géoglyphes, ces dessins gigantesques qu´on voit au Pérou, dans les déserts du Chili, de l´Arizona, du Nevada. De la Namibie aux Etats-Unis les sujets différent, les techniques restent les mêmes. Si la redécouverte de l´art préhistorique est bien cette « aventure grandiose aux répercussions multiples » dont parle Emmanuel Anati, la découverte d´une seule grotte constitue l´aventure d´une vie qu´elle transforme et magnifie. On l´a bien vu lors de la présentation de la découverte des gravures et peintures de Roucadour avec Jean-Paul Coussy en 1962, et aussi avec le géologue Guy Astruc qui a découvert celle de Pergouset sur la commune de saint-Juéry en 1964. La dernière découverte effectuée dans le sud de la France par Marc Deluc date de septembre 2000 à Cussac, sur la rive gauche de la Dordogne. Elle a été expertisée par Norbert Aujoulat qui a souligné son style très proche de celui de Pech-Merle . C´est aussi la première grotte où l´on a trouvé les ossements de sept individus : six adultes et un adolescent.

L´ETERNEL PORTRAIT DE L´HOMME ?

Si le roman des cavernes est un roman à suspens, ce n´est pas pour autant un roman noir. Les mains qui figurent dans bon nombre de grottes de la planète (on en découvre encore de nouvelles à Bornéo) constituent toujours un mystère. Quelle est leur signification ? Représentent-elles une signature, la volonté affichée d´un échange ou comme le croit l´artiste François Bouillon un éternel portrait de l´homme.
Peut-on parler vraiment de contradiction entre Emmanuel Anati qui jette des passerelles entre les créateurs de la préhistoire et nous et Jean Clottes et Pierre Daix qui nous mettent en gardent sur la dérive qui consisterait à juger de la préhistoire d´après les règles de notre société ?
Y a-t il contradiction entre les préhistoriens dont le travail, d´après leur propre déclaration, consiste à faire une analyse puis à bâtir des hypothèses, et les artistes qui échafaudent un univers, leur univers en suivant les voies secrètes et exigeantes de l´intuition créatrice ? Rien n´est moins sûr, même, si au détour d´un débat on a eu le sentiment, comme l´a suggéré notre deuxième modérateur Emmanuel Anati, non sans humour que les esprits en traversant les millénaires avaient opacifié leur langage pour mieux nous en faire perdre le sens.
Dominique Baffier, conservateur en chef du patrimoine fait elle aussi partie, au meilleur sens du terme, des nouveaux gardiens du temple. Au titre de conservateur de la grotte Chauvet , découverte il y a dix ans en Ardèche, elle se retrouve en charge d´une galerie qui ne compte pas moins de 410 représentations datées de 32 000 ans, et dont la majorité est constitué d´une faune sauvage de mammouths, de lions, d´ours et de rhinocéros. Un bestiaire en action n´affichant pas de repentir, toutes griffes dehors et dont la virtuosité fait toujours l´admiration de notre préhistorienne en chef.

AFFINITES ELECTIVES

Dans ce métier qui ressemble beaucoup , on l´aura compris, à une vocation hommes et femmes sont à parité . Ce ne sont pas des scientifiques dénués de sensibilité. L´émotion fait aussi partie de leur savoir. On peut sans crainte de se tromper, l´affirmer aussi des artistes présents jugeant ceux du passé selon le principe des affinités électives. Pour Yann Fabès, plasticien, une intime conviction : les peintures et les gravures des grottes préhistoriques n´ont pas été faites pour êtres vues. A l´image d´un polyptique toscan de Pierro de la Francesca, elles proposent un message secret non réservé aux profanes. Quant à Konrad Loser, également plasticien, venu d´Allemagne, il pense que les oeuvres des cavernes étaient le produit de la mémoire et qu´à ce titre elles ne sont pas un art réaliste.
Toutes les interprétations ont pu se faire jour. Tous les chemins ont été semble t-il esquissés, de manière à nous inciter à revenir au coeur de ce Quercy sur les traces de nos semblables, nos frères en somme d´il y a 32 000 ans.


Maria Roubaud


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